Les appels au meurtre et les cris de guerre qui ternissent certains textes sacrés ne peuvent pas être d’inspiration divine. Ce sont en fait des versets sataniques puisque Dieu ne saurait commanditer l’élimination d’un être créé à son image sans se renier lui-même. Tuer un homme au nom du Très-Haut apparaît comme un acte bassement diabolique, au sens étymologique du mot « diable » : désunion, division. Un tel comportement dénote une incohérence criminelle, c’est un sanglant auto-goal. Et pourtant, de la conquête féroce du pays de Canaan par les Hébreux à l’Etat islamique coupeur de têtes en passant par les Croisades ou l’Inquisition, les religions furent l’une des principales causes d’extermination au cours des siècles. Qui le contestera ?
Mais d’où vient le caractère criminogène d’une foi fondée a priori sur le Souverain Bien ? Qu’est-ce qui la pervertit ? Deux facteurs complémentaires l’entraînent vers cette sphère mortifère : la prétention de détenir l’exclusivité de la vérité et l’identification à un Etat pour imposer sa croyance à tout le monde. L’institution religieuse utilise le bras armé du pouvoir étatique pour asseoir son emprise. Le Christ s’est élevé avec véhémence contre cette confusion entre le spirituel et le temporel. « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu » (Lc, 20, 25) dit-il en précisant aussi que son « Royaume n’est pas de ce monde » (Jn, 18, 36). Contrairement à Mahomet qui fut à la fois un fondateur de religion et un chef militaire, Jésus ne s’est jamais présenté comme un leader politique. Il a toujours dénoncé le mélange des genres, vecteur de violences, mais il ne fut hélas guère entendu.
Ce mariage vénéneux entre la religion et l’Etat, nous le retrouvons au XVIe siècle dans la formule cujus regio, ejus religio : telle région, telle religion. L’identité d’un territoire se définit par sa religion. Cette conception s’oppose radicalement à la laïcité et à la liberté de conscience. Censée sauvegarder la paix, cette règle conduisit en réalité à des persécutions ou à l’exil de populations ne partageant pas la foi de leur terroir. Principe dépassé ? Sûrement pas si l’on en croit certains politologues suggérant une partition du Moyen-Orient en un Alaouistan, un Sunnistan, un Chiistan… Comme s’il était impossible de faire cohabiter différentes croyances sous un régime laïc. Cette position n’est-elle pas aussi « diabolique » dans le sens où elle implique une division entre les religions, source d’exclusion et terrain propice à de futures guerres ? À l’heure de la mondialisation, quelle dramatique régression ! Plus près de nous en Europe, n’est-ce pas aussi ce que prône une Nadine Morano, l’ex-égérie de Sarkozy, lorsqu’elle proclame que « la France est un pays judéo-chrétien de race blanche » ?
Pour combattre cette tendance criminogène des religions, nous proposerons trois axes :
- La laïcité qui s’enracine notamment dans les Evangiles : l’Etat n’a pas de couleur religieuse. Il a pour fonction de garantir la coexistence des diverses religions et façon de penser comme l’athéisme. Chacun est libre d’exprimer ses convictions à condition qu’il respecte celles de l’autre.
- Un enseignement de science des religions comprenant aussi la problématique athée dispensé dans toutes les écoles : loin de faire l’apologie d’une seule foi, ce cours présente les traditions religieuses comme différents chemins menant au sommet d’une montagne ou comme les multiples rayons d’un soleil, pour reprendre la belle image du concile Vatican II.
- Enfin, last but not least, une relecture critique des textes sacrés (Bible, Coran…), soit pour les expurger de leurs « versets sataniques » (tuez-les tous !), soit en distinguant clairement les passages inspirés par la Parole divine et les récits historiques ou autres considérations humaines trop humaines pouvant contenir des épisodes guerriers.
À quand un tel programme, dans les pays du Moyen-Orient par exemple ?
Jacques de Coulon
Paru dans La Liberté du 16 octobre 2015
Bonjour,
Ce petit message pour vous exprimer ma profonde gratitude pour votre engagement. Votre conférence de hier soir m’a grandie en humanité.
Cordialement
Nadia