Islam et démocratie: quel mariage?

Après les ignobles attentats en France, deux comportements opposés sont à proscrire: la stigmatisation de tous les musulmans et l’angélisme face à un islam idéalisé. L’islamophobie repose sur un amalgame résumé par l’équation suivante: islam = islamisme = terrorisme programmé. Cette généralisation abusive est d’abord une grossière faute de logique, un déni du logos qui est le propre de l’être humain. Ce climat de haine est aussi ce que recherchent les auteurs des tueries: un engrenage de la violence où ils pêcheraient en eaux troubles et se mueraient en fers de lance des victimes musulmanes venant grossir les rangs de l’islamisme. Les extrêmes se nourrissent l’un l’autre.

L’angélisme de certaines bonnes âmes consiste au contraire à se voiler la face devant les problèmes posés par la croissance de l’islam en Europe. Vive le métissage des cultures sur nos terres d’asile! Plus de la moitié de la population (57% des Allemands, par exemple) considère l’islam comme une menace? Cette populace est ignorante et manipulée par l’extrême droite! Ces élites bien-pensantes s’aplatissent comme des carpettes devant les tapis de ceux qui revendiquent toujours plus d’avantages, au nom du respect de leur culture. En plaçant l’ouverture à l’autre, quel qu’il soit, au-dessus des valeurs républicaines, ces démocrates mous prennent le risque de créer des Etats dans l’Etat. Leur apologie du multiculturalisme mène au communautarisme et bientôt à l’affrontement entre communautés si les lois de la République ne sont plus placées au-dessus des règles religieuses, fussent-elles tirées d’un texte sacré. Il faut le reconnaître: un certain islam ne se marie pas avec notre démocratie et le métissage est refusé par ceux qui veulent préserver la «pureté» de leur communauté.

Qu’en est-il du Coran? Comme dans la Bible, on y lit de très belles pages, mais aussi des versets appelant au «combat sur les sentiers d’Allah» (Sourate IV.76) et à la guerre contre les mécréants. L’expression «tuez-les tous où que vous les trouviez» apparaît en plusieurs endroits (IV.89, IV.91 ou IX.5). On dira que le combat concerne d’abord les vices à l’intérieur de l’homme et que les appels au meurtre visent les traîtres renégats et pas tous les non-musulmans. Ces phrases ont été rédigées à Médine lorsque l’islam embryonnaire était attaqué. Il faut donc les replacer dans leur contexte, ce que ne font pas les fondamentalistes qui les prennent au premier degré pour endoctriner leurs ouailles. L’interprétation littérale et hors contexte de ces versets profite aussi bien aux islamistes radicaux qu’aux chantres de l’extrême droite. Aux premiers pour envoyer leurs sbires semer la terreur chez les «infidèles», aux seconds pour renforcer l’islamophobie et se poser en défenseur de l’Occident. Reste que certains passages sont problématiques, tel celui-ci: «Les chrétiens disent que le Messie est fils de Dieu. Qu’Allah les combatte! Ils se sont fourvoyés» (IX.30).

D’où l’importance d’une éducation à la citoyenneté et d’une lecture critique des écritures sacrées qui suppose une formation pour tous dans une école se définissant comme une, laïque et républicaine. C’est l’objectif d’un cours comme celui des sciences religieuses dans notre canton. Les écoles communautaires doivent se plier aux règles de la République ou disparaître. On ne tolérera plus de dérogations aux programmes officiels pour tel groupe de croyants. On bannira aussi tout espace où la charia ou tout autre canon religieux prévaudrait sur le droit public, comme dans certaines mosquées. Quant à la formation des imams, elle devrait se faire officiellement dans les Facultés de théologie des universités pour éviter la prolifération incontrôlée de «fous d’Allah» venus de l’étranger. L’islam ne sera ni ostracisé, ni laissé en pâture à des bergers fanatiques mais intégré à notre République. Telles sont les conditions d’un mariage de raison entre l’islam et nos démocraties.

Paru dans La Liberté du 13.1.2015

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